La vie, la mort, quelle importance? Benjamin n’avait aucune raison de vivre sans Alice. Plus exactement il ne lui restait que des raisons secondaires, des liens sans but concret, sans enjeux passionné. Hors la ville qu’il aimait, la seule pour qui il se serait damné s’était réveillée loin de lui. C’était au tour de Benjamin de souffrir, à son tour de connaître un sommeil profond contre lequel il ne pouvait lutter. Dans ses rêves intenses il revoyait sans cesse sa rencontre avec Vladimir que le visage d’Alice venait adoucir, planant au dessus de lui pendant les moment douloureux. Son doux visage veillait sur lui comme un mirage angélique, lui rappelant avec ardeur sa promesse: ne pas mourir. La brune avait eu des paroles fortes à l’encontre de Ben’ lorsque celui - ci avait quitté l’hôpital sans se retourner. Des mots ancrés à jamais dans l’esprit de Benji qui se les rappelait sans cesse, lorsqu’ allongé sur la table d’opération du bourreau suprême, son sang se vidait peu à peu. Il fermait alors les yeux, certain que le sang qu’il perdait redonnerait vie à sa belle.

Convaincre Vladimir n’eut pas été chose difficile, il était le fils d’un de ses plus proches amis! Bien qu’il n’eut jamais connu son père que pour sa réputation de spécialiste renommé, Benjamin n’ignorait rien du respect que portait l’homme pour son père et il en avait bien profité! « C’est du gâchis! Avec ton physique tu pourrais t’offrir toutes les femmes que tu veux! » Benjamin manqua de l’insulter virulemment, que représentait les autres filles à côté de la femme dont il était amoureux? Rien. Absolument rien. « C’est elle que je veux et c’est ma vie que vous allez lui offrir! » L’homme ne répondit pas, se contentant d’appeler sur le champ ses « serviteurs ». Bien évidemment, ce sadique ne dit rien à Ben’ du déroulement de l’opération, ne l’épargnant d’aucune crainte et d’aucune douleur.

Allongé sur son sofa, Benjamin peinait à ouvrir les yeux. Depuis combien de temps dormait - il? Comment lui en faudrait - il pour récupérer ses forces? Il ne le savait pas. Mais ce qui le rongeait littéralement c’est qu’il ignorait entièrement dans quel état se trouvait Alice. Quelques heures d’acharnement après son réveil, son regard se posa sur le carrelage blanc et lisse qui lui rappela étrangement celui de l’hôpital. Ce n’était pas le parquet de chez lui, les murs aussi étaient blancs. Se mourrait - il? Non. En réalité il l’avait rejoint. L’hôpital, un lieu que le jeune homme ne pouvait plus supporter, qu’il voulait quitter. « Bonsoir Mr Elsiter, comment vous portez - vous? » Une voix douce le rappela à lui, une blouse blanche irritant ses iris encore habituées à la noirceur de la nuit. Voilà soixante - quatorze heures que le spécimen colmatait loin de toute réalité. Il attendit que l’infirmière parte, et s’empressa d’arracher les innombrables fils qui s’enroulaient autour de sa musculature. Il enfila jean et T-shirt sans prendre le temps de regarder autour de lui et sauta par la fenêtre. Rassuré en constatant qu’il n’avait pas perdu son agilité de spécimen, il détala jusqu’ à son appartement.

Furax, il renversa tout ce qu’il trouvait afin de trouver L’Objet qu’il cherchait. La photo, il récurait chaque recoin de son appartement espérant la retrouver. Aveugle, elle trônait sagement sur son piano, n’attendant que son destinataire. Benjamin devait absolument savoir où se trouvait sa chère et tendre. L’idée qu’elle le croit perdu, mort peut - être lui était insurmontable. C’était tout simplement impossible. Il alla s’assoir, le bien entre ses mains et s’efforça à plonger son regard sombre dans ses iris si claires. Il lui faillait la voir. La vision vint doucement après quelques minutes, mais l’homme étant encore affaibli, elle fut brève et floue. Une chambre, un immeuble non loin du pont bordant la ville et elle laissant libre court à ses larmes, collée contre la baie. Il n’y avait qu’un lieu qu’Alice, ne résidant pas à New York, était susceptible de s’offrir, un hôtel respectable proche du centre. Il n’était sûre de rien mais son instinct pris l’avantage, guidé par sa fourbe.

Plus il se rapprochait de sa destination et plus il ressentait sa présence. Il en était certain, elle était là, tout près. Echappant avec tact et une ruse certaine au regard maladroit de la réceptionniste, il se faufila dans les étages jusqu’à reconnaître la porte qu’il avait vu dans sa vision. A cet instant il bénit sincèrement Aprilia de lui avoir inculquer ce don précieux. La porte s’entrouvrit sous la pression de sa main tremblotante… personne. La pièce baignait dans l’obscurité la plus totale, seul un souffle envahissait le vide de la pièce. S’avançant délicatement il s’approcha des draps, silencieux. Alice était là le visage dans ses mains. Ben’ ne su pas si elle dormait ou non, alors il se risqua à s’allonger près d’elle, la ramenant doucement sous l’emprise de ses bras forts. Un murmure se fit entendre, il redouta sa réaction. Serait - elle heureuse? Lui en voudrait - elle? Les deux peut - être, avec Alice on ne pouvait jamais vraiment savoir, on ne pouvait que douter…